Que manger à Toulouse : Une plongée dans la célèbre Chocolatine

Aucun petit-déjeuner français n'est complet sans la mention d'une délicieuse pâtisserie : la Chocolatine, plus connue dans certaines régions de France sous le nom de Pain au Chocolat. Cette pâte feuilletée, fourrée d'une, deux ou même trois tablettes de chocolat noir, constitue le cœur de la gastronomie française et possède une histoire fascinante qui traverse les continents, une reine historique et les frontières linguistiques.

La traditionnelle Chocolatine du Sud-Ouest.

La Chocolatine définie

La Chocolatine est un produit de base des boulangeries françaises et un favori des amateurs de pâtisserie du monde entier. Il s'agit d'une pâtisserie de forme rectangulaire composée de couches de beurre et de pâte pliées ensemble pour créer une pâte feuilletée et beurrée. Le centre est rempli d'un, deux ou même trois bâtons de chocolat qui fondent pendant la cuisson, créant un délicieux contraste entre le chocolat sucré et gluant et la pâte croustillante et salée.

Chocolatine vs. Pain au Chocolat : Une pâtisserie à deux noms

Le débat sur le nom du pain au chocolat est controversé et dépend généralement de l'endroit où l'on se trouve en France. Alors que le terme "pain au chocolat" est généralement utilisé dans la partie nord de la France, le terme "chocolatine" est principalement utilisé dans la région du sud-ouest, y compris à Toulouse.

Un témoignage amusant, bien que sérieux, de la force de cette fidélité régionale se trouve dans une petite boulangerie située juste au coin de ma rue à Toulouse. Cette boulangerie vend la même pâtisserie que celle dont nous venons de parler - le mélange heureux de pâte feuilletée et de chocolat fondant. Cependant, elle a pris position dans la bataille linguistique. Si vous entrez dans cette boulangerie et commandez une "chocolatine", vous devrez payer le prix standard de 1,00 €. En revanche, si vous osez commander un "pain au chocolat", vous devrez débourser 1,50 € pour la même pâtisserie ! C'est dire si cette fierté locale est bien ancrée, et c'est un bon indicateur du sérieux avec lequel les Toulousains prennent leur patrimoine culinaire.

Par ailleurs, ce clivage linguistique Chocolatine vs Pain au Chocolat est tellement notoire qu'en 2017, un groupe de députés de droite l'a porté devant le Parlement. Les députés, issus du parti Les Républicains, réclamaient une modification du code rural et de la pêche maritime, notamment de l'article L. 640-1 relatif à la " politique menée en matière de qualité et d'origine des produits ". L'objectif de cette modification était de " favoriser l'usage courant du nom en raison de la notoriété publique du produit et de ses qualités reconnues à travers un nom populaire ".

"Cette évolution légère de la loi redonnera ses lettres de noblesse à de nombreux produits du terroir. Ce sera le cas, par exemple, d'une pâtisserie dont le nom est historiquement originaire de la région gasconne et qui fait la fierté de tout le Sud de la France : la chocolatine", écrivent les signataires de l'amendement. " Je suis le député du Sud-Ouest qui veut défendre la marque de son territoire contre mes collègues parisiens et leur snobisme du pain au chocolat", précise le député du Lot Aurélien Pradié.

Aurélien Pradié, député (LR) de la première circonscription du Lot, principal promoteur de l'amendement "chocolatine" déposé à l'Assemblée nationale.

Cependant, le ministre de l'Agriculture Stéphane Travert a estimé que cela ne relevait pas du Parlement. Si cet amendement a été rejeté, les députés ont voté en faveur de la proposition de l'ancienne socialiste Delphine Batho. Elle souhaite l'inscription dans le code rural et de la pêche maritime de la volonté de "promouvoir les produits n'ayant pas contribué à la déforestation importée".

Le rôle de l'occitan et son influence sur le terme Chocolatine

La prédominance du terme "Chocolatine" dans le sud-ouest de la France a beaucoup à voir avec la langue occitane. Cette langue romane, utilisée au Moyen Âge, est encore parlée aujourd'hui dans certaines régions du sud de la France.

Bien que le français soit aujourd'hui majoritairement parlé, l'occitan est toujours chéri dans la région et continue d'influencer le dialecte local. Cette influence s'étend aux terminologies culinaires, comme le terme "Chocolatine". Son utilisation dans le sud-ouest est un témoignage linguistique de l'identité culturelle dynamique de la région et de sa résistance historique aux tendances centralisatrices de Paris.

Les origines austro-hongroises du croissant

Pour comprendre les racines de la Chocolatine, il faut plonger dans l'histoire de son cousin culinaire, le Croissant. Les origines du croissant, pâte feuilletée roulée, remontent au XIIIe siècle en Autriche, où il a vu le jour sous le nom de"Kipferl", un petit pain fait d'une pâte feuilletée avec du beurre ou du saindoux et du sucre.

La forme du croissant de Kipferl est apparue plus tard, au XVIIe siècle, dans la ville de Vienne, en Autriche. L'histoire prend un tournant en 1683, lors du siège de Vienne par les Ottomans. Selon la légende, les boulangers de la ville, qui travaillaient tard dans la nuit, entendirent les opérations de creusement de tunnels menées par les Ottomans et donnèrent l'alerte. La ville fut sauvée et, pour commémorer cette victoire, les boulangers fabriquèrent une pâtisserie ayant la forme du croissant de lune du drapeau ottoman, donnant ainsi naissance à la forme contemporaine, symbole de la victoire sur les envahisseurs.

Le Kipferl traditionnel de Vienne, à l'origine du croissant français contemporain.

Le voyage en France

Le croissant n'est pas arrivé en France du jour au lendemain. Le chemin de Vienne à Paris a été long, et deux théories s'affrontent sur la façon dont il est arrivé.

Marie-Antoinette et la tradition viennoise

L'une des théories les plus répandues concerne Marie-Antoinette, la jeune princesse autrichienne qui épousa Louis XVI et devint la dernière reine de France. On dit souvent que la jeune reine, qui avait le mal du pays, a introduit le Kipferl à la cour de France pour l'aider à s'adapter à sa nouvelle patrie. Cette théorie, bien que romantique, manque de preuves historiques solides, et il est plus probable que les pâtisseries soient entrées en France par des moyens plus ordinaires.

August Zang et la révolution de la boulangerie française

La théorie la plus largement acceptée attribue l'introduction du croissant en France à un officier d'artillerie autrichien nommé August Zang. Au début du XIXe siècle, Zang a quitté sa carrière militaire pour ouvrir à Paris une boulangerie viennoise. Il a apporté avec lui une foule de recettes viennoises, dont le Kipferl. Ses techniques de cuisson innovantes, l'introduction des fours à vapeur et une large gamme de pâtisseries viennoises ont rapidement attiré l'élite parisienne, transformant la scène boulangère de la ville.

Au fil du temps, les boulangers français ont adapté le Kipferl à leurs préférences, créant le plus familier des Croissants à base de pâte feuilletée. Cette variante luxueuse est rapidement devenue un produit de base des boulangeries françaises et un symbole de la gastronomie parisienne.

La création de la Chocolatine

Pendant que le croissant prenait d'assaut Paris, la ville de Bordeaux créait discrètement sa propre variante : la Chocolatine. Certains affirment qu'au cours du XIXe siècle, un boulanger inconnu a décidé de fourrer le croissant avec du chocolat, créant ainsi la première Chocolatine. Cependant, les détails exacts restent un mystère, enveloppés dans des couches de conjectures historiques. Certains historiens de l'alimentation affirment que la Chocolatine est une création anglaise en raison de la similitude du terme avec le mot anglais "chocolate", mais cette théorie se heurte souvent à une certaine résistance, en particulier dans le sud-ouest de la France.

Lorsque le croissant a fait son apparition dans le sud, les habitants ont commencé à désigner la version fourrée au chocolat par le terme occitan "Chocolatina", qui s'est finalement transformé en "Chocolatine" en français. Ce terme régional, ainsi que l'histoire linguistique et culturelle de l'Occitanie, ont contribué à l'identité de la Chocolatine et ont déclenché un débat permanent avec le "Pain au Chocolat" du nord.

La Chocolatine aujourd'hui

La prochaine fois que vous mordrez dans une Chocolatine chaude et feuilletée, souvenez-vous de son parcours fascinant, depuis les boulangeries de Vienne en proie aux Ottomans jusqu'aux innovations bordelaises à base de cacao, en passant par la façon dont elle en est venue à représenter les identités régionales de la France. À chaque bouchée, vous dégustez une tranche d'histoire, un témoignage de l'évolution culinaire et, surtout, un amour partagé pour cette délicieuse pâtisserie qui transcende les frontières et les barrières linguistiques. Savourer une Chocolatine, que ce soit dans le sud de la France, dans les rues animées de Paris ou dans une boulangerie de votre ville natale, c'est prendre part à une expérience gastronomique mondiale aussi riche en saveurs qu'en histoire. Ainsi, la prochaine fois que vous entendrez le débat "Chocolatine vs Pain au Chocolat", vous comprendrez qu'il ne s'agit pas seulement d'un nom, mais d'un délicieux symbole de fierté régionale et d'héritage culturel. Bon appétit !

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